En effet, elle en avait rêvé de cette liberté, très tôt... Petite fille, elle s’imaginait dans la classe d’un magister ludi, improvisée dans un coin du Forum, écoutant les multiples péripéties de l’incroyable voyage d’Ulysse.
Cet espoir de bonheur inaccessible la fascinait. Malheureusement pour elle, la dure vie qu’elle menait en ce moment en était loin...
Pour l’instant, elle marchait toujours, perdue dans ses réflexions, le panier contenant Quintus à la main. Elle souriait, c’était une brave fille. Il en fallait du courage pour traverser les nombreuses et tout aussi pénibles épreuves qui lui étaient arrivées dans son existence de misère - même si, elle le savait bien, ces obstacles n’étaient pas aussi insurmontables que ceux d’Hercule ... Il n’y avait donc aucune raison de craquer !
Ses malheurs avaient commencé quand elle avait été abandonnée : par qui ? Elle l’ignorait : tout ce qu’elle savait, ou plutôt devinait, c’était qu’étant donné la somme qui avait été laissée dans les draps qui l’enveloppaient, ses parents devaient être assez aisés, pour ne pas dire très riches ! Le pourquoi de cet abandon était encore plus curieux : Claudius, l’homme qui l’avait recueillie, l’avait découverte en bonne santé et il n’y avait donc aucune raison de l’abandonner... Peut-être parce qu’elle était une fille ? Le mystère restait et resterait toujours entier. Si elle avait pris ce petit sous ses ailes, sans savoir qui il était, et d’où il venait, c’était sans aucun doute qu’elle s’identifiait à lui : trop consciente de la souffrance qu’implique d’être orphelin, elle se refusait lui infliger...
Les pleurs de Quintus la sortirent de ses pensées : il avait froid. Il commençait à pleuvoir, le vent s’était levé et comme si ça ne suffisait pas, la nuit menaçait de tomber d’une minute à l’autre. Il fallait trouver un abri et vite...