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Publié : 15 novembre 2006
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Chapitre 2 : une jeune inconnue

Une silhouette se dessinait dans la pénombre. Elle ouvrit délicatement le drapé dans lequel Quintus était enroulé.
C’était une main fine, une main de femme.

Elle attrapa les quelques sesterces qui se trouvaient dedans, et s’enfuit.

On la voyait s’éloigner dans la brume, dans les sanglots de Quintus, gravement malade.
Puis la silhouette s’arrêta brusquement. Elle revint et emporta le bébé avec elle...

Il faisait maintenant nuit, les rues de Rome étaient sombres en cette période hivernale. La jeune femme courait de plus en plus vite, pour échapper à l’atmosphère lugubre que dégageaient ces ruelles.

Elle sortit de la ville, et arriva devant une grande colline, éclairée par la pleine lune.
On entendait le clapotis de l’eau. C’était le petit ruisseau qui coulait en bas de la plaine.
D’étranges bruits résonnaient de part et d’autre de cette vaste étendue de prairies.
La femme semblait effrayée, elle gigotait dans tous les sens, de peur que quelqu’un ne la suive.
En haut de la colline se dressait une petite cabane, dont les fenêtres éclairées rassuraient.

La jeune femme ouvrit doucement la porte, et entra.
Elle portait toujours à son bras le panier dans lequel Quintus était caché.

Un homme d’une cinquantaine d’années était assis sur une chaise usée, et croquait dans une pomme.

« Alors ? Que nous ramènes-tu aujourd’hui ? »

Il était vêtu d’une toge, et de souliers visiblement neufs. Ses petits yeux marrons étaient dissimulés sous une masse de cheveux gris, mi-longs. Son petit sourire au coin des lèvres lui donnait l’air mesquin.

« J’attends une réponse Julia ! »

La jeune femme s’approcha, la tête baissée, et s’agenouilla par terre.

« Je n’ai rien trouvé... les rues étaient désertes, et...

_Alors qu’y a-t-il dans ce panier ? »

Julia se releva, toujours tête baissée.
Elle entrouvrit le drap, laissant visible la tête du bébé.
Quintus était rouge de fièvre, et des petits boutons blancs étaient apparus sur sa peau.

L’homme se leva, et gifla sans prévenir la belle Julia, qui tomba à terre. Quintus pleurait.

« Tu n’as rien à m’amener, et en prime, tu oses revenir avec un enfant malade ?

_Je...

_Sors d’ici ! »

Julia s’empara du panier qu’elle avait laissé tomber, et courut vers la sortie.

Quelques secondes plus tard, l’homme sortit à son tour :
« Julia ! Je t’ordonne de revenir ! »

Mais elle courait de plus en plus vite.

« Tu reviendras bien un jour ! » hurla l’homme, qui se retrouva d’un coup pris à son propre piège.
Il rentra en claquant la porte.

Julia, essoufflée, s’arrêta. Elle posa le panier sur l’herbe, et s’adossa à un arbre qui se trouvait là. Elle s’endormit.

Le lendemain matin, la jeune femme fut réveillée par les cris de Quintus.
Elle le prit dans ses bras, et lui caressa les joues, priant pour qu’il ne meure pas.
Elle leva la tête, et vit dans les feuillages le soleil qui rayonnait, lançant des éclats sur ses cheveux or.
Julia était une jeune femme fine, à la peau blanche comme neige. Sa chevelure bouclée encadrait un joli visage, d’où ressortait de grands yeux vert d’eau.
Elle portait une modeste tunique, et des sandales trouées.

Elle se leva, et attrapa un fruit de l’arbre. Elle était étonnée que des arbres donnent encore des fruits en cette saison. Mais elle le prit quand même.
Julia s’approcha du bébé, ouvrit sa petite bouche en cœur, et pressa le fruit dans la paume de sa main. Quintus avala le jus.

Elle arracha plusieurs fruits, les posa dans le panier, et sortit un sesterce.
En le voyant, elle sourit. Elle avait gardé les pièces données avec l’enfant.

En marchant dans la prairie, vers le nord, elle repensait à ce que l’homme avait dit : « Tu reviendras bien un jour ! ».
Elle s’accroupit et se mit à rire comme une enfant, pendant plusieurs longues minutes.