Nous chevauchions à bride abattue sur le chemin qui descendait vers le bourg. J’entendais le bruit des sabots encore assez lointain des chevaux de nos poursuivants. Earenya prenait soin de garder une bonne distance entre eux et nous, car s’ils nous rattrapaient, nous étions perdus.
Le village se rapprochait de plus en plus. Certains habitants encore dehors nous virent passer en trombe dans les rues d’Ilœb. A peine étions-nous sortis du bourg que, me retournant, je vis les soldats y entrer à leur tour.
Une exclamation d’Earenya me remit dans le bon sens. Des soldats appartenant à la même troupe d’élite que nos poursuivants arrivaient en face. Earenya me cria : « Tiens-toi bien ! » et fit faire volte-face à son cheval.
Elle se mit à galoper vers le bois à l’est du village, espérant peut-être les y semer. Nous nous y dirigions quand j’entendis un sifflement à mes oreilles : « Earenya, ils nous tirent dessus ! »
Tout à coup, je l’entendis crier : « ’Sliom corhcaigh dä veth ! »
Je perçus des hennissements de chevaux derrière moi et, en me retournant, je vis une sorte de barrière faite de vents qui tournoyaient sans cesse se dresser entre les soldats de la Garde Noire et nous, couvrant ainsi notre fuite en les empêchant de nous poursuivre.
Nous continuâmes à chevaucher un bon moment avant de nous arrêter dans un bosquet d’alizées.
Je descendis de cheval mais une question me revenait toujours à l’esprit : les mots que l’Elfe avait prononcés étaient magiques, j’en étais sûr, en revanche, que voulaient-ils dire ?
Je me rapprochais d’Earenya et lui demandai :« « La magie dont tu t’es servie tout à l’heure, est-ce celle que je suis capable de créer ? »
Me regardant dans les yeux, elle me répondit : « Je ne sais pas. »
Etonné, je lui répondis sèchement : « Tu ne sais pas ? Alors que tu viens de faire de la magie ! »
Earenya planta de nouveau son regard profond dans le mien et répliqua : « Non, il est vrai que je ne sais pas de quelle magie tu es capable car il en existe différentes sortes dans ce monde. Vois-tu, moi, je suis une élémentaliste c’est-à-dire que je me sers des 4 éléments. Comme tu as pu voir, la barrière que j’ai créée était faite de vents.
_Et les mots que tu as prononcés, sont-ils semblables pour toutes les magies ? Je croyais que les sorciers se servaient d’une seule et même magie ?
_Non, les gens qui ne détiennent pas de pouvoirs magiques appellent ceux qui en ont des sorciers à tort car je me sers de magie mais élémentaire, je suis donc une élémentaliste.
Les sorciers se servent de la sorcellerie, une magie faite de sorts et de potions.
_Je ne vois pas la différence. »
Earenya soupira et continua : « Les sorciers ont besoin de sortilèges mais aussi de potions qu’ils fabriquent eux-mêmes car sans celle-ci, les sortilèges seraient sans effet. Un bon sorcier doit savoir combiner les sorts et les potions entre eux. Les élémentalistes comme moi se servent des ressources naturelles. Si j’ai besoin de me servir de la Terre, je peux aller les chercher dans le sol car dans chacune de ses parcelles réside une source d’énergie qui me permet de me servir de mes pouvoirs. Même chose pour l’Eau car elle abreuve la Terre dans le sol. Je ne pensais pas que tu me demanderais des choses comme ça maintenant, je... »
Elle s’interrompit. Je ravalai la question que je comptais lui poser et écoutais. Le silence fut soudain troublé par des pas que quelqu’un ou plusieurs personnes essayaient d’étouffer. Je compris que les soldats avaient eu le temps de contourner la barrière pendant que nous parlions. Je maudissais mon erreur quand un craquement plus proche que les autres se fit entendre.
« Qu’est-ce-que.... »
Je ne terminai pas ma phrase. Je sentis un choc sourd contre ma tête et tout devint noir.